Interview de Nicolas Batista, auteur du livre « Le complexe de la main droite »
- Amine Abdelli
- 15 juin 2017
- 5 min de lecture
Il y a quelques jours, il s'est lancé dans un financement participatif (ici) pour publier la première édition de son livre. Allons à la découverte de ce nouvel auteur rouennais !
Est-ce que tu pourrais te présenter ?
Je m'appelle Nicolas Batista. Je suis rouenais et j'ai 28 ans. Je travaille dans l'associatif et l'éducation populaire, à droite et à gauche, mais ma vraie passion c'est vraiment l'écriture. J'ai toujours adoré écrire, depuis aussi loin que je me souviens.

De quoi parle ton livre ?
Mon livre… C'est assez difficile à expliquer et à force qu'on me demande j'en suis arrivé à dire une phrase courte qui n'explique rien du tout mais qui a de la gueule : « c'est une histoire d'amour à disséquer ». Mais plus précisément j'ai voulu écrire une histoire qui décortique les bagages émotionnels des gens lorsqu'une rencontre amoureuse est en court. Les enjeux de chacun, les peurs cachées, les espoirs mal exprimés, les tensions non-résolus avec son passé... On va suivre la rencontre et la construction amoureuse d'un couple en alternant entre l'esprit de l'homme et celui de la femme, et on va devenir les seuls témoins de tout ce qui n'est pas dit.
Combien de temps as tu mis pour écrire ?
J'ai commencé à réfléchir et à fonder la trame il y a deux ans à peu prêt, alors que j'étais salarié. Quand l'envie d'écrire a été trop forte, j'ai démissionné pour m'y consacré et j'ai mis une année pour l'écrire. Aujourd'hui je le considère fini, mais il est en phase de correction auprès d'amies meilleures que moi en orthographe et grammaire.
Quelles sont tes influences ?
Bizarrement je ne suis pas un très grand lecteur. J'ai vraiment du mal à trouver un livre qui me plait et que je finis en entier. Récemment j'ai lu Bel Ami et ça m'a vraiment transcendé, et je pense qu'il y a un peu de Bel Ami dans mon personnage masculin principal. Mon vrai livre « bible » qui m'a inspiré c'est « L'insoutenable légèreté de l'être » de Milan Kundera, qui est un livre puissant sur les enjeux affectifs des êtres humains, sur la difficulté d'aimer, sur la sexualité dévorante. Le système d'aller retour dans le temps m'a beaucoup inspiré. J'ai énormément lu d'articles de psychologie pour écrire ce livre, sur l’œdipe, sur la peur de l'engagement, sur le narcissisme… Et aussi, pour la construction de l'histoire, la série US « The Affair » m'a pas mal aidé.
A quoi va servir le financement participatif ?

J'ai fais un financement participatif sur Ulule où je demande 1200euros. L'idée est de mettre en place une dynamique autour de la sortie de mon livre et de permettre aux copains de pouvoir le lire. Donc le financement va essentiellement me permettre d'imprimer le manuscrit en version papier, livre, avec une belle couverture et tout ce qu'il faut pour faire un livre. Ça va également me permettre d'avoir des livres d'avance et de les envoyer aux maisons d'édition en espérant que ça tape dans l’œil de quelqu'un et que les choses prennent une autre tournure. Autant faire le truc jusqu'au bout.
Pourquoi choisir se moyen de financement ?
Premièrement parce que j'ai vraiment besoin de cet argent si je veux pouvoir imprimer le livre moi-même. C'est un bon moyen de rendre un projet individuel collectif. Après effectivement, c'est une démarche assez bizarre et je ne suis pas convaincu de bien le vivre, il me faut un peu de recul pour le dire, mais l'idée de demander de l'argent à ses proches c'est assez stressant et étrange comme sensation. Mais je me disais aussi que le fait de faire un Ulule c'est un peu comme faire un événement et ça créé une dynamique autour de la sortie du livre. Depuis, on m'en parle très souvent, même des gens pas très proche de moi qui me félicitent pour l'avancée du projet. Ça me permet de faire connaître mon projet, mais ça m'oblige à me mettre en avant, c'est un dilemme un peu contemporain j'ai l'impression. En plus aujourd'hui, si le projet avorte ou que le livre ne plaît pas, ce sera sur la place publique. Mais bon, il paraît qu'il faut croire à ce qu'on fait alors…
Et après ?
Et bien si le financement réussi, je commencerais par souffler un peu, parce que, mine de rien, c'est un peu stressant d'attendre les mails de Ulule qui indiquent que j'ai un nouveau soutien. Et puis je pourrais lancer les impressions auprès de l'imprimeur que j'ai trouvé, commencé à préparer la soirée de remerciement de septembre. Je vais également me renseigner sur les maisons d'édition, sur les salons du livre, pour apprendre un peu à connaître ce milieu étranger. Dès que j'aurai les versions livres, je les enverrais en croisant les doigts.
Un dernier message ?
Weltschmerz. C'est un terme allemand qu'un ami m'a fait connaître il y a très peu de temps. Je vous invite à chercher sa définition sur Wikipédia.
Pour les plus curieux, voici un extrait du livre :
Elle repensait aux rues qu'elle traversait en rentrant chez elle, ses rues qui lui avaient inspiré maintes choses durant toutes ses années, ses rues qu'elle avait emprunté à différents moments de sa vie et qui, selon l'époque, s'associaient à différents contextes et souvenirs. Elle se rappelait de l'époque où cette rue, la longue rue dans laquelle vivait Arthur, lui évoquait surtout le fameux bar qui fermait plus tard que les autres et où elle finissait toutes ses soirées trop arrosées, où elle avait vu des couples se former, où elle avait renversé son verre accidentellement sur une autre cliente qui lui avait agrippé les cheveux et qu'on avait été obligé de sortir du bar de force. Plus tard, elle associait cette rue au parc public qui la terminait, et dans lequel elle avait passé tout un été à y lire et à y réviser des concours, seule ou accompagnée, et à mesure qu'elle y marchait à cette autre époque qui nous intéresse, elle aurait voulu se retourner, remonter la rue jusqu'à ce qu'elle atteigne le parc, s'y asseoir et s'attendre, patienter jusqu'à ce qu'elle apparaisse, plus jeune, d'un autre espace temps, avec ses livres et ses notes qu'elle avait oublié depuis, pour s'observer et reprendre le contrôle sur ce temps qui filait trop vite.
L'horloge de la vie ne faisait pas de pause, jamais, et l'esprit de Stella n'était pas assez efficace pour tout analyser, tout comprendre, tout digérer à la même vitesse qu'elle. L'horloge, impassible, filait, continuait son travail routinier et cyclique, pendant que Stella tentait, en vain, de suivre la cadence. Mais voilà, l'horloge avait toujours raison d'elle, transformant continuellement les souvenirs associés aux rues, ne lui laissant pas d'autres choix que d'oublier les vieilles liaisons dépassées pour espérer suivre le rythme du présent. La rue, pour le moment, était celle d'Arthur, réajusté par cette nouvelle mise à jour de ce qui était jadis la rue du parc des révisions, qui était elle même la mise à jour de la rue du bar qui ne fermait pas.
Elle arrivait en bas de celle-ci, au croisement avec une autre rue remplie de souvenirs. Elle patientait au feu, attendant son tour, appréciant le soleil brûlant. Sentant l'immense artère derrière elle, elle ne pouvait s'empêcher de se demander combien de temps elle resterait pour elle, la rue d'Arthur. Bientôt peut-être, elle serait la rue d'un homme avec qui elle avait passé une soirée agréable. Et puis, dans plusieurs années, tout autre chose encore.
Envie d'en savoir plus ? Go ! https://fr.ulule.com/le-complexe-de-la-main/
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